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Se protéger des perturbateurs endocriniens

Le Dr Cosserat, médecin généraliste à Saint Raphaël, spécialisé dans la périnatalité, travaille en Haïti, au Laos (dans l’Association « Les médecins de Chinguetti et Pakbeng »),  à Madagascar, en Mauritanie ; il est maître de stage et directeur de thèse des étudiants qui travaillent sur ce sujet.

Hommage à Theo Colborn, théoricienne des perturbateurs endocriniens, dès 1988 cette biologiste américaine avait remarqué que dans les grands lacs des USA, les poissons avaient des anomalies génitales importantes. Suite à ses publications, elle a été persécutée par les industriels américains et a déclaré à la fin de sa vie qu’avoir raison trop tôt expose à des désagréments.

Les perturbateurs endocriniens

L’exposition à un mélange de produits chimiques omniprésents à des concentrations trouvées dans le liquide amniotique humain affecterait la transcription hormonodépendante thyroïdienne, l’expression des gènes, le développement du cerveau et le comportement au début de l’embryogenèse.

Ainsi avec les poly perturbateurs endocriniens et d’autres produits chimiques, une arborisation de problèmes considérables apparaît avec comme corollaires les hypofertilités et de nombreux autres problèmes pour les bébés en gestation.

Sources:« Perturbateurs endocriniens, signalisation thyroïdienne et neurotoxicité au cours du développement. » par Jean-Baptiste Fini, PhD, Evolution des régulations endocriniennes,
Museum National d’Histoire Naturelle/CNRS UMR 7221 Paris 07/11/15

Où trouve-t-on les perturbateurs endocriniens?

  •  dans les pesticides utilisés en grande quantité dans l’agriculture,
  •  dans les produits plastiques : phtalates, bisphénols A, (qu’on essaie de remplacer par les S et les C qui sont tous toxiques,
  •  dans les conservateurs des cosmétiques : les parabens
  •  divers composés chimiques industriels tels les PCB, les PBDE, dioxines, les éléments dans les gaz d’échappement, dans les fumées de cigarette, les solvants, peintures.

Attention à la chambre de bébé : Le formaldéhyde des meubles en aggloméré, les peintures neuves, moquettes neuves qui relarguent… bébé va dormir 18 h sur 24 dans une ambiance polluée.

  •  dans les médicaments

Il y en a partout en fait, dans la viande venant des USA bourrée d’œstrogènes…  la liste est impressionnante. Tous ces produits restent dans l’environnement après leur utilisation par l’homme, parfois durant plusieurs dizaines d’années.

Les effets des perturbateurs endocriniens

Le *CRAT, Centre de référence des Agents Tératogènes, ce site vous donne les dernières informations validées sur les risques en préconceptionnel, chez la femme enceinte, chez la femme allaitante, les médicaments dont il faut se méfier en préconceptionnel. (Attention aux anti-inflammatoires, maintenant c’est validé : Revue « Prescrire » pour les médecins).

Les problèmes d’hypersensibilité chimique aussi sont dus aux perturbateurs endocriniens et ils deviennent très préoccupants.

Les effets des perturbateurs endocriniens sur les organes génitaux

Aujourd’hui des substances comme les phtalates, des bisphénols, sont partout autour de nous : un savon de mauvaise qualité, de plastiques alimentaires, un emballage  un gobelet en plastique, toute la journée nous sommes  en contact avec ces perturbateurs. On a parlé des phtalates comme des antagonistes des androgènes.

L’effet dose: les effets des petites doses  peuvent avoir des conséquences dramatiques alors que des fortes doses n’ont aucun effet biologique. 

L’effet cocktail : des molécules peu ou non toxiques prises isolément peuvent devenir nocives lorsqu’elles sont mélangées.

Certaines périodes de la vie sont cruciales : notion de fenêtre d’exposition: pendant la période préconceptionnelle, la grossesse, l’enfance ; les effets des perturbateurs endocriniens ont de plus graves conséquences et à plus long terme ainsi qu’au niveau épigénétique.

Par exemple, deux à trois semaines après la fécondation de l’ovule par le spermatozoïde (alors que la femme ne sait pas qu’elle est enceinte), le bourrelet génital qui est identique chez l’homme et chez la femme,  se développe et,  s’il s’agit d’un garçon,  crée le pénis, le scrotum, les bourses, l’appareil génital masculin.  A  ce moment-là, le perturbateur va avoir de graves effets : le pénis de ce bébé va  se développer de façon incomplète ou défectueuse :

– micropénis, hypospade, (l’urètre n’est pas abouché au bout du pénis, une anomalie génitale importante à rectifier)

– fréquentes cryptorchidies (testicules non descendus dans les bourses).

A un moment précis de la grossesse  de très petites doses ont de très graves conséquences.

Par contre une forte dose (1000, 10 000, même 100 000  fois la dose du même perturbateur)  prise par la mère à 3 mois ou 6 mois de grossesse, n’aura pas d’effet biologique… Mais un autre effet qui est discuté, et qui est très polémique :

Le genre et les problèmes de troubles d’identité du genre.

Source : Publication « Troubles de l’identité du genre chez les adolescents ».

L’orientation sexuelle est polyfactorielle mais a certainement une composante biologique. Par rapport à ce qu’il se passait il y a plusieurs siècles, l’augmentation des pesticides a un  grand impact. Il existe de nombreuses publications sur le sujet.

Les perturbateurs endocriniens auraient donc un effet sur les troubles d’identité de genre :

Il y a de plus en plus de garçons qui ne savent pas s’ils sont vraiment des hommes.

Cela vient probablement en partie de cette période néonatale où ces perturbateurs endocriniens ont eu une influence. L’effet des petites doses peut provoquer des anomalies génitales mineures, mais si l’anomalie génitale est plus importante, les organes génitaux  seront intermédiaires entre les organes génitaux masculins et féminins, ce qu’on appelle des problèmes de pseudohermaphrodisme.

Ce n’est pas anecdotique : actuellement an Allemagne et en Australie, il y a 3 cases pour les papiers de déclaration de naissance : masculin, féminin et indéterminé. Parce qu’il y  de plus en plus de cas ou on ne sait pas si les bébés sont des filles ou des garçons. Ce sera déterminé dans un 2ème temps avec les caryotypes pour savoir de quel côté on peut orienter les enfants avec des hormones. Ce sont des choses importantes d’où l’intérêt d’être très très prudent à ce moment-là.

D’autres problèmes sont liés à ces perturbateurs endocriniens.

Les effets des P.E sur les pubertés précoces et leurs conséquences.

Pour les filles, le problème  va surgir plus tard sous la forme d’une puberté précoce dès 8-9 ans : la poitrine se développe précocement, les premières menstruations apparaissent dès l’âge de 10 ans. Ces sont des conséquences de l’imprégnation hormonale.

Pour une fille qui a ses premières règles à 10 ans, alors qu’une fille née il y a un siècle  avait ses premières règles à 15 ans, (en France sous Louis XIV, il y a quelques siècles, c’était 17 ans) :

  •  1er problème : ses seins sont exposés aux hormones beaucoup plus tôt et si elle prend une pilule de 15 à 35 ans, les risques d’un cancer avant la ménopause augmentent.
  • deuxième effet très important et fréquent : les ovaires micropolykystiques avec interférence avec les diabètes.
  •  les endométrioses : autre problème de la femme qu’on voit exploser depuis 30 ans (greffe à l’intérieur du péritoine de petits fragments de muqueuse utérine).

Lors de la période embryologique où le bourrelet génital se ferme pour constituer les ovaires, l’utérus, le vagin, et la vulve, à ce moment-là, si la fermeture  est défectueuse, des petites molécules de cellules de muqueuse utérine se disséminent autour du rectum, de la vessie, du péritoine causant l’endométriose; les femmes sont quasiment mutilées par ces endométrioses.

Il faut dépister très tôt les symptômes, et souvent les médecins passent à côté au début :

  • règles très douloureuses, les jeunes filles ne peuvent pas aller à l’école dès leurs premières règles, pliées en deux, elles vont saigner dehors, dans leur ventre.
  • Hypofertilité, difficulté à concevoir.
  • Dyspareunies très importantes (douleurs occasionnées lors des relations).

Un dépistage précoce évitera ainsi que trop de cellules de l’endomètre se mobilisent à l’intérieur du péritoine.

Effets des perturbateurs endocriniens sur le cerveau

Perturbateurs endocriniens et baisse de QI

« Les facultés cognitives pourraient être une sorte de marqueur des expositions in utero et pendant la petite enfance à des agents chimiques. » Dr Barbara Demeneix, auteur de « Le cerveau endommagé-Comment la pollution altère notre intelligence et notre santé mentale »

Les phtalates et leurs effets sur le QI.

Il y a de plus en plus de publications internationales qui en parlent, qui plus est dans le grand public :

             La perte de QI due à l’effet des phtalates représente un coût faramineux pour la société (Le Monde). Les conséquences sont plus définitives que jamais.

Troubles du développement et du comportement

  • Poids de naissance inférieur
  • Troubles du spectre autistique et trouble du déficit de l’attention / hyperactivité (TDAH). Les polluants atmosphériques, les pesticides, les phtalates, les solvants et les PCB sont suspectés.
    Entre 1985 et 2014, il y a eu une flambée de l’autisme.

Le rôle de l’alimentation, du fer et du magnésium, l’âge du père (plus les pères vieillissent, plus il y a risque d’autisme).

L’autisme est sans doute un problème polyfactoriel, et évidemment les perturbateurs font partie des facteurs.

Perturbateurs endocriniens et transmission transgénérationnelle

Au niveau de l’épigénétique, c’est dramatique aussi parce que les perturbateurs endocriniens vont avoir un effet sur les méthylations de l’ADN. 

On transmet à sa descendance malheureusement les contacts avec les produits utilisés à présent. Les arrières arrière-petits-enfants des enfants à qui on donne la vie actuellement  vont avoir ces problèmes.

Un malheureux exemple, le drame des femmes qui ont pris du Dystilbène.

Aux USA, il y a une trentaine d’années, pour que le bébé s’accroche bien, des oestrogènes artificiels ont été administrés aux futures mères, quelques années après, on a constaté que les filles qui naissaient, avaient plus tard des cancers des organes génitaux, du vagin, de la vulve, de l’utérus et n’étaient pas fertiles ; les hommes qui sont nés avaient d’énormes problèmes de spermatogenèse.

A la 3ème génération de ces femmes, les enfants filles comme garçons ont des problèmes majeurs, cancers, hypofertilité, maladies graves, pour un perturbateur endocrinien qu’on a utilisé il y a 30 ou 40 ans. Le problème est vraiment important.

Parenthèse pour la France pour inciter à la pharmacovigilance :

Il y a eu 17 ans d’écart entre les premières publications aux USA (interdiction) et  l’interdiction en France.

Les étudiants en médecine actuellement y sont de plus en plus sensibilisés. C’est un élément d’optimisme.

Obésité, cancer, diabète, il y a un fossé entre l’état des connaissances et la réglementation. Il faut attendre 10, 20, 30 ans pour que les choses bougent.

Pour l’amiante par exemple, les premières publications sur ses dangers sont parues en 1930.

Le rôle de la nutrition

Pour démontrer l’influence de la nutrition sur les changements épigénétiques, et à quel point on peut agir uniquement à partir de la nutrition pour le bon développement physique, l’exemple des abeilles est très explicite:

Les abeilles ouvrières et les reines sont homozygotes, identiques. La seule différence, c’est que les ouvrières sont nourries de pollen et de miel, et les reines uniquement de gelée royale. Il en résulte que les reines sont plus grosses, plus résistantes, plus fertiles et meurent plus vieilles.

En fait, seulement 15% de gènes expliquent le phénotype, alors que 85% des gènes que l’on croyait autrefois inutiles (l’effet « poubelle ») vont être modifiés par l’environnement, la nutrition, les radiations ionisantes, la relaxation, la méditation, le yoga, l’ocytocine produite avec les caresses, la sexualité et les câlins, les oméga 3, le sel iodé…

Conseils:

  • Acheter des produits vraiment bios avec le logo Déméter plus fiable que AB dont le cahier des charges est moins exigeant.
  • Consommer fruits, légumes verts, tomates.
  • Eviter les poissons prédateurs (thon, espadon…)
  • Consommer des huiles omega 3 est essentiel pour le système nerveux central : saumon, maquereau, anchois, sardines…
  • Pas d’alcool : le verre de trop à une certaine période de la grossesse est catastrophique alors qu’une coupe de champagne à 8 mois n’est pas grave.
  • Limiter café, soja…

Lire plus: La nutrition de la femme enceinte

            Attention : évitez de faire un régime agressif dans les 4 semaines à 3 mois qui précèdent la conception parce que tous les perturbateurs endocriniens, phtalates, bisphénols inclus  dans les cellules graisseuses des futures mères vont être relargués en tout début de grossesse dans le cordon et c’est une catastrophe pour le bébé. De nombreuses études ont validé cette information. Alors si vous envisagez un régime ou une diète, il faut l’anticiper dans l’année qui précède le début d’une grossesse.

Quelques liens utiles pour se protéger des perturbateurs endocriniens: